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024 – Consciences humaines

Le pluriel vient suggérer une complexité inhabituelle par rapport à l’idée d’une conscience qui relèverait d’un oui ou non, être conscient ou non. Viendront aussi les questions : conscience de quoi, conscience de qui. Comment ? Pourquoi ?

Trois volets à cette découverte de la conscience humaine, multiple. D’abord la question du rapport entre conscience et réalité d’expérience humaine. La réponse sera du côté d’une «re-présentation» de l’expérience humaine. Avec la structure cohérencielle de la conscience ce sont différents types de consciences qui constituent la conscience existentielle. Mais une autre conscience vient dépasser celle-là, la conscience de Sens. Enfin consciences et intelligences humaines viendront poser en les dépassant l’intelligence symbolique. Nous allons en parcourir ici les premiers repères.

La conscience comme re-présentation de l’expérience humaine.

Que savons nous de la réalité ? Ce que nous connaissons de l’expérience que nous en faisons. L’expérience est l’actualisation du Sens en conSensus structurée selon le cohérenciel de l’expérience première; cela vaut pour notre réalité existentielle. Mais il arrive que cette expérience soit l’objet d’une connaissance qui surajoute alors l’expérience d’être celui qui connait, doté d’une conscience. Dans un temps de prédominance de la conscience mentale on l’a posée comme conscience réflexive comme si elle était une sorte de double intellectuel, mental, de la réalité; qu’elle la représente. A tel point que cette représentation puisse venir décrire, prédire ou même se prétendre à la source de la réalité même. S’il y a là quelque déviance, on y trouve une piste de compréhension. Encore une fois le langage nous parle. Il y aurait re-présentation mentale de l’expérience. Cela veut dire «présentation à nouveau».

Comme nous l’avons vu la réalité est actualisation du Sens de notre Instance en conSensus. Actualisation dans l’actualité, présentation de la réalité. C’est cela l’expérience première que nous avons exploré. La réalité se présente ainsi selon une structure cohérencielle celle de l’expérience humaine. La conscience est re-présentation c’est-à-dire une expérience seconde. Comment est-ce possible? Simplement en comprenant que la re-présentation est ré-actualisation du Sens en conSensus. Une deuxième expérience du Sens en conSensus. Mais pour que ce soit possible il faut que soit toujours activé ou réactivé ce ConSensus pour que la personne soit en mesure de le réactualiser. On notera que l’on peut envisager une re-présentation de l’expérience seconde, de la conscience de la réalité première qui est alors conscience de la conscience. De même on peut aussi renouveller l’expérience seconde et re-présenter à nouveau la conscience initiale dans une seconde conscience.

Ainsi tout se passe comme si la conscience était un écho de l’expérience première qui peut se reproduire avec quelques variations comme aussi écho de l’écho. Cela rend compte des complexités de la conscience y compris qu’elle puisse être prise comme objet de conscience. Cela pose en plus que cette conscience et les multiples échos de l’expérience première complexifie l’expérience de la réalité. En effet les re-présentations sont comme des réalités secondes mais réalités d’expérience humaine cependant. Quelle est la réalité de la France, re-présentation de quelque chose sans doute, mais établie comme réalité sur laquelle d’autres re-présentations vont venir en écho et enrichir cette réalité là.

Un autre aspect est dans le fait qu’il n’y a conscience et re-présentations que s’il y a permanence de l’Etre, du Sens en l’Instance. L’expérience de la réalité, première ou seconde ou plus en écho, est expérience de l’Instance. La mémoire, le souvenir y participent. Cette re-présentation de l’expérience nous donne accès au travers des existants, consciences et re-présentations comprises, à l’être en nous, l’être de Sens notre Instance. Rappelons que l’Instance est comme l’âme, l’esprit ou plutôt l’âme spirituelle de la personne. Nous verrons avec l’intelligence symbolique comment la conscience existentielle peut nous donner accès à une conscience de Sens, de l’être en nous-mêmes.

La conscience existentielle, dimensions et composantes.

Si la conscience est représentation de l’expérience humaine alors de nombreuses oeuvres de l’humanité sont des témoignages de cette conscience. L’art et les sciences par exemple mais aussi les productions du langage, de la pensée et toutes sortes de réalisations qui témoignent de la conscience humaine, de l’expérience humaine, de l’homme lui-même en tant qu’être spirituel incarné. Il est d’abord important d’envisager les dimensions de la conscience et ses composantes en découvrant pour une part que ce sont différentes modalités de la conscience existentielle et qu’on retrouvera alors les réductionismes et les distorsions déjà rencontrées. Un grand problème de l’humanité, celui du développement et de l’usage d’une conscience qui le révèle ou qui l’aliène.

La conscience existentielle subjective est la conscience intuitive. La conscience existentielle objective est analytique, elle sépare et distingue. La conscience existentielle projective est une conscience rationnelle, elle articule et ordonne. La conscience existentielle sensible est une conscience affective qui éprouve et apprécie. La conscience existentielle factuelle est une conscience pratique, une habileté interactive. La conscience existentielle formelle est une conscience mentale celle qui est souvent assimilée à la conscience tout court dans la modernité. Il nous faudra étudier ces différents modes de conscience et leurs échos mutuels avec le type d’intelligence associée. En effet la re-présentation de l’expérience première ou de la conscience seconde peut se faire selon les différents modes, chacun faisant écho aux autres. Ainsi la corrélation entre les modes de conscience, de connaissance et d’intelligence est-elle d’un grand intérêt. On découvrira là une complexité que les idéologies de l’époque modernes ignorent et qu’il est temps de dépasser.

La conscience de Sens et l’intelligence symbolique

A quoi mène la conscience humaine? Pas seulement à construire un monde de réalités humaines mais à révéler l’homme lui-même dans son être transcendant à la source de cette réalité là. La conscience existentielle ne suffit pas il y a faut une conscience d’un autre type qui est la conscience de Sens. La conscience de Sens n’est pas la conscience de quelque chose mais de quelqu’un, de celui que nous sommes comme être spirituel, être de Sens. Par la médiation de la conscience existentielle mais aussi son dépassement nous pouvons accéder au Sens en conSensus qui y est actualisé. Cette conscience de Sens est aussi celle d’une Cohérence, un ensemble de Sens de notre Instance où le Sens est associé à son inverse et d’autres encore. C’est pourquoi elle est discernement des Sens. Et ce discernement est à la base de toute liberté humaine, liberté de choix de Sens, liberté de se disposer dans tel ou tel de ces Sens une clé majeure de l’Humanisme Méthodologique. Cette conscience de Sens est aussi conscience du conSensus dont dépend la réalité et la conscience existentielle. C’est la condition pour travailler sur ce conSensus. Outre le discernement, la conscience de Sens apporte une certaine maîtrise permettant un travail de conSensus c’est-à-dire un travail sur et dans la réalité commune, avec les autres. L’agir humain est en jeu et donc aussi le «Méthodologique» de cet Humanisme là.

La liberté issue du discernement n’a d’autre lieu que celui du conSensus. Elle en est donc responsable. Cette liberté d’être n’est pas une exonération des conditions autres mais une responsabilité, ayant ainsi à en répondre. La conscience de Sens relève d’un processus qu’il faudra comprendre pour l’exercer. Cela fait partie des pratiques de l’intelligence symbolique, un grand pan de l’Humanisme Méthodologique. L’intelligence symbolique intègre et dépasse les différents modes de conscience existentielle et considère que toute réalité est symbolique c’est-à-dire porteuse de Sens partagés. La conscience de Sens en est le processus révélateur.

7 commentaires

  1. Bonsoir,

    Je reviens au tout début du texte, sur la définition de l’expérience. Au passage je trouve cette question de la conscience, en lien avec celle de l’intelligence, mais aussi celle de la connaissance, très importante, et à bien comprendre notamment pour distinguer ces notions de celle de réalité(s) abordée(s) précédemment.

    Je voudrais juste si possible un recalage sur la définition d’expérience : « L’expérience est l’actualisation du Sens en conSensus structurée selon le cohérenciel de l’expérience première ».

    L’expérience première (celle du ou des consensus) est métaphysique, ainsi, elle est réelle mais n’a pas structure de réalité ? (cohérentiel).

    Tel que je comprend cette phrase, je dirais : l’expérience est l’actualisation de l’expérience première (qui est celle du ou des Sens en consensus). La « présentation », l’expérience primordiale ». Toutes ses actualisations (les expérience, donc, toujours secondes) : les « représentations ». Merci de votre aide

    • Une précision. C’est avec le conscience que vient la notion de re-présentation. Cette re-présentation est aussi une expérience mais de conscience. C’est aussi la consistance de la réalité, augmentée par les re-présentations. L’expérience première est bien structurée selon les termes du cohérenciel mais reste en deça de toute conscience tant qu’il n’y a pas re-présentations. Cette expérience première n’existe pas en conscience donc en réalité. Son siège est l’Instance mais c’est aussi celui de toute expérience, de toute conscience, de toute réalité. C’est donc l’identification originelle à la réalité de soi et du monde qui fait l’existence du monde. En cela l’Instance est métaphysique si la réalité est assimilées au physique et alors le Sens, les Cohérences, le conSensus, l’expérience première sont métaphysique parce que non existentielles, c’est-à-dire non conscientes. Tout ce qui traitera ultérieurement de l’Instance est du même ordre (activations actualisations, problématiques humaines, etc.). Le cohérenciel est un modèle métaphysique mais dès qu’il est constitué des termes d’une réalité quelconque il en devient un modèle virtuel. Même chose pour les cartes de Sens.
      A noter que ce ne sont pas seulement les expériences secondes qui constituent la conscience mais le fait qu’elles sont re-présentations et manifestent ainsi l’être de qui expérience première et re-présentations sont issues et donc en témoignent. C’est pour cela que l’édifice de la réalité et de la conscience servent à la révélation de l’être, de l’Instance et des Sens, sous conditions de s’en enquérir.

  2. Bonjour,

    Cette articulation entre conscience et réalité amène pour moi de nombreux questionnements, encore confus.
    Conscience et réalité sont manifestations (re-présentations), trace de l’être en soi ET de l’être des autres en consensus (l’expérience première), plus ou moins universel, donc partagé.

    « Cette expérience première n’existe pas en conscience donc en réalité » : conscience équivaudrait à réalité ? Un co-déploiement ?

    Pourtant, je soupçonne une asymétrie, avec prévalence de la conscience.

    A méditer, avec vos contributions, merci encore

    • La conscience est acte de réalisation il n’y a pas d’un côté la conscience de l’autre la réalité sauf à re-présenter par exemple sous le mode formel une réalité d’expérience (de conscience antérieure). Alors la conscience seconde semble postérieure à la réalité alors qu’elle ne fait que l’augmenter. Il n’y a pas co-déploeiment parce qu’il n’y a pas deux. Exemple des mathématiques re-présentation mentale effet de conscience mentale qui forment en partie la réalité scientifique.
      Il faut moduler cela selon le Sens en conSensus qui correspond à des croyances différentes quant à la réalité et à la conscience.
      Il est juste de considérer que le Sens en conSensus est le réel. Le cohérenciel de l’expérience première, métaphysique, peut être dit réel mais le risque de confondre avec une re-présentation mentale est grand comme tout ce qui concerne l’Instance, réel de toute réalité..

  3. ok, exposé ardu pour moi, mais j’y vois plus clair :

    la conscience, c’est un phénomène, une réalité.
    Comme toute autre réalité, elle est re-présentation d’expérience(s) première(s).
    Par contre, le phénomène de conscience se structure comme toute réalité (avec notamment la dimension formelle de la conscience : conscience mentale).
    Les réalités sont corrélatives, conscience et réalité sont corrélatives.
    La conscience de la conscience c’est déjà un autre phénomène (second).

    Merci

    • Il n’y a pas la conscience comme phénomène et la réalité, soit comme contenu soit comme « déjà-là en l’état ». Le phénomène (humain ) c’est la re-présentation qui est à la fois conscience et réalisation (active) de la réalité. Consciences comme réalités sont des phénomènes humains constituant l’expérience humaine et toutes ses re-présentations. La conscience de la conscience c’est comme la réalité de la réalité c’est seulement le jeu des re-présentations et l’augmentation de l’existence du monde.
      Il n’y a pas de conscience ni de réalité en soi en elles-mêmes mais pour soi pour nous-mêmes. Ma conscience n’est pas quelque chose d’autre que mon expérience, même si j’en scrute tel ou tel aspect. la réalité n’est pas autre chose que la réalité que je réalise (avec les autres ce qui peut conduire à oublier que c’est son expérience personnelle qui est conscience et réalité expérimentée) Désigner une réalité c’est un acte de réalisation. Faire comme si la réalité était indépendante c’est oublier d’être le sujet de l’acte de réalisation.

  4. Merci pour ces précisions.
    Pour donner une conclusion à cet échange, je me permets de proposer aux lecteurs un nom : Laurent Nottale, et une théorie : relativité d’échelle.
    Un travail sérieux et reconnu de ce physicien, en écho aux notions abordées.

    Cordialement

    D

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