Toutes les communautés humaines sont fondées sur une Cohérence en conSensus. Le conSensus des Instances est d’ordre spirituel et comporte un ensemble de Sens comme une boussole qui indique tout un ensemble de directions. Ce conSensus s’actualise dans une réalité communautaire comportant une collectivité d’individus et le monde qui est le leur. Chaque communauté peut être dite culturelle et il faut expliciter les différents aspects de la notion de culture attachée à celle de communautés humaines.
La culture c’est la façon d’exister de la communauté dans toute sa diversité et ses potentialités. La culture est en effet capacités, potentialités de la communauté mais aussi actualité des réalisations communes, qu’elles soient identifiées à un patrimoine ou même à des ambitions. La réalité communautaire est celle de l’expérience première mais aussi de tout ce qui l’augmente par les effets de conscience dans tous les aspects de son existence et constitue sa culture.
Il y a donc la culture dans ses manifestations et la culture dans ses potentialités. Tout ce qui constitue le monde de la communauté est culturel et de ce fait contribue à une identification collective. Cette identification peut en venir à la conscience d’un « nous » qui se reconnait dans ses réalités culturelles mais aussi dans ce qui les sous tend et reste inconscient, du moins avant l’accès à une conscience symbolique. Néanmoins, ce soubassement est souvent appréhendé comme une origine quasi sacrée si bien que des objets culturels semblent alors investis d’un sacré communautaire qui se traduit aussi par une sorte de culte. Nos sociétés modernes si souvent agnostiques multiplient les rituels de ce type de sacralité dont La Culture majuscule fait aussi l’objet. Ce faisant elle se veut universelle et indépassable. On a déjà croisé ce travers, qui domine encore notre actualité sans être gêné par la contradiction avec la revendication d’une exception culturelle. Cette sacralité commune se retrouve dans toutes les communautés humaines comme attachées à des signes d’identifications que des réductionnistes cherchent à absolutiser, à idolâtrer en définitive comme le fait un certain modernisme aussi bien que des archaïsmes récurents.
La culture c’est encore l’art de cultiver. Il s’agit de cultiver les potentialités culturelles au travers d’oeuvres culturelles ou toute réalisation qui l’est aussi. Les arts et métiers et toutes les compétences et professions d’une communauté culturelle témoignent de ce « cultiver » là. On pense alors au fait de cultiver les individus au travers de dispositifs éducatifs et au travers de démarches personnelles et collectives. Cette culture là est participation à l’existence commune, intégration culturelle. Mais elle introduit l’idée d’une profession comme mode de participation à une culture. Cultiver ou se cultiver c’est progresser ou faire progresser. Sur quel axe, dans quel Sens, selon quelles modalités, selon quelles échelles de valeurs et quelles appréciations des progrès culturels (évaluations)? C’est là une question majeure mais qui demande, d’une part, de discerner les Sens possibles et leurs conséquences et, d’autre part, de comprendre ce qu’est l’évolution humaine, ses phases de maturation et ses seuils de mutation existentielle. Ces questions majeures seront développées largement dans la seconde partie avant d’envisager les modalités de progression culturelle dans la troisième partie. La culture communautaire y trouvera la forme du développement communautaire et des affaires humaines toutes communautaires donc toutes culturelles.
On insistera sur une difficulté historiquement et culturellement située. C’est celle de l’universalisme qui ignore l’altérité et s’opposerait a un différentialisme qui réduit les cultures à des différences existentielles. Dans les deux cas est ignorée l’altérité radicale des hommes et celle des communautés. Elles s’ancrent dans leur être spirituel, Instances pour les personnes, conSensus d’Instances pour les communautés qui n’ont pas d’être en propre pour autant. La différence des cultures est radicale dės lors que leur monde leur est propre mais pas lorsqu’une comparaison est possible. Il faudrait en effet se tenir dans une position multi-communautaire pour qu’une communauté de référence apprécie lles différences entre ses communautés membres selon ses propres critères de référence. Il n’y a jamais comparaison sans référentiel commun. C’est là un tout autre aspect que nous développerons un peu plus loin avec les ensembles communautaires.
Pour parachever cette exploration de ce que sont les cultures comme communautés culturelles. Il nous faut d’abord observer que chacune repose sur une des Cohérences qui constitue l’Instance de chaque être humain, son humanité. C’est donc sur une part d’humanité que repose chaque culture. Tout se passe comme si chaque culture avait en héritage le soin de cultiver cette part d’humanité, de la réaliser dans le monde qui est le sien et de la révéler au travers d’une conscience symbolique ou conscience des Sens. La culture est ainsi un révélateur d’humanité après en être un réalisateur. C’est sa vocation, sa mission, sa charge, sa responsabilité. L’accomplissement d’une culture est de cet ordre. Ainsi si toute culture représente une part d’humanité, elle réalise une part d’un monde des humains dont la communauté est toujours en gestation. La mondialisation trouve là sa signification essentielle. La communauté universelle ne se substitue pas aux communautés particulières qui en sont on le verra la condition indispensable. Chaque communauté singulière dans ses réalités, autre que toute autre, est en même temps détentrice d’une part de l’humanité universelle. Mais alors l’universel se situe dans l’ordre de l’humanité spirituelle et pas dans celui de ses réalités existentielles. La confusion est humainement destructrice. La culture ainsi est porteuse d’universel mais pas dans ses manifestations singulières qui comme le sont les langues sont toujours culturelles même si elles se prétendent universelles.
Il reste à envisager la consistance d’une culture sur le plan existentiel. On va retrouver les trois dimensions de toute réalité existentielle et ses trois composantes ici enrichies des consciences qui en augmentent sa réalité.
La dimension objective, contextuelle. La culture comme environnement. Figure lointaine du ConSensus c’est l’ensemble des objets qui composent le monde propre à une communauté culturelle. Son environnement tel qu’elle le réalise, ses conditions de ressources ou de contraintes, son patrimoine, l’état des lieux d’existence de la communauté culturelle. Les individus qui l’habitent y sont là comme recensés, dénombrés et regroupés par ensembles distincts de même que tous les acteurs et facteurs d’existence communautaire. On trouvera l’idée que certains objets acteurs et facteurs sont plus centraux et d‘autres plus périphériques sinon attribués à quelque extériorité. L’inventaire de ce monde propre peut-être ainsi hiérarchisé.
La dimension subjective, intentionnelle. La culture comme volonté. Une communauté majeure est un «nous» porteur de volonté. Cependant avant même cette conscience intentionnelle des aspirations communes des motivations spécifiques expriment tel ou tel Sens du conSensus. Pour la communauté culturelle cela apparait comme une subjectivité singulière, comme la psychologie d’un sujet collectif. Le pire et le meilleur font partie des intentionnalités possibles, spécifiques à chaque culture autant que la subjectivité des personnes est toujours singulière malgré des ressemblances. Des critères de valeurs culturelles propres servent dans chaque communauté culturelle de repère d’orientation désirable. Ces repères prennent toutes sortes de formes et notamment celle de la référence à des personnalités repères, les «grands hommes», ou des personnages, réels ou mythiques, dont c’est la détermination et la volonté qui sont évoqués.
La dimension projective ou historique. La culture comme histoire. Chaque communauté culturelle a une histoire propre et même plusieurs selon le Sens du ConSensus prédominant. Le récit des origines pour sa genèse, celui des péripéties spatio-temporelles de son développement historique, mais aussi ses projets de développement à l’avenir avec les récits anticipés qui s’y attachent. Chaque communauté culturelle se raconte et raconte sa culture ainsi. Prennent place dans ce tableau historique les choses et les hommes et aussi les évènements marquants. La narration historique donne aussi un lien de rationalité entre les composantes et la continuité temporelle de la communauté culturelle sa cohérence historique.
La composante sensible et émotionnelle. La culture comme passions. Le climat affectif né du conSensus joue un rôle majeur dans le sentiment de communauté d’affects, communauté fusionnelle bien souvent, communauté de passions, passions inclusives et passions exclusives. La culture communautaire dans ses archaïsmes est faite de ces passions éprouvées, recherchées ou fuies au travers, par exemple, de rassemblements qui font autant de chambres d’écho pour le meilleur ou pour le pire. A notre époque les médias y jouent un grand rôle dans un maniement de l’opinion publique qui n’est qu’émotion publique, un jeu d’échos. La culture communautaire c’est aussi toutes sortes de gammes de sensibilités, de colorations, de musiques, de sentiments qui expriment les variations du conSensus et en disent le vécu. C’est au travers de manifestations spécifiques que ce vécu est renouvelé et entretenu assimilant émotion partagée et unité communautaire. Il va sans dire que les passions culturelles sont porteuses aussi du pire que notre modernité s’est révélée incapable de comprendre préférant s’en abstraire dans un rationalisme impuissant au moment où les théories archaïques de la lutte nécessaire et supposée vitale proliféraient.
La composante factuelle et pratique. La culture comme usages. Les corps humains ou matériels sont engagés dans des interactions qui organisent subsistance et sécurité mais aussi tout ce qui conforte la communauté, ses membres et ses biens. Un savoir faire, des productions, des compétences spécifiques, des pratiques opportunes forment un ensemble d’us et coutumes qui caractérise une communauté culturelle. Cela dépend de son environnement et ses variations, cela dépend de l’historicité du moment. Tout cela se cultive pour en faire progresser la maîtrise dans les périodes ou les meilleurs Sens du conSensus sont à l’oeuvre. Tout cela régresse et décline lorsque ce n’est pas le cas. Ainsi lorsque des communautés s’approprient leur culture et leur développement elles progressent et lorsqu’elles en sont dépossédées notamment lorsqu’une caste, un Etat, un occupant s’en approprient le magistère elles régressent culturellement malgré les exploits affichés de la communauté dominatrice. Crises économiques dit-on, crise de dépossession communautaire !
La composante formelle et mentale. La culture comme images. La culture y a souvent été réduite en se prétendant universelle c’est-à-dire déconnectée de ses fondements humains et communautaires. Ces difficultés contemporaines sont le masque de la pensée culturelle, d’un déni des cultures qui se révèle de plus en plus comme un déni d’humanité au profit d’abstractions mentales idéologiques (cela en est la définition). C’est la culture de ses plus mauvais Sens qui amène cette distorsion là. La culture communautaire des re-présentations mentales en a été survalorisée tout en capitalisant une multitude de savoirs, d’oeuvres d’arts, de sciences, de modèles, de structures, de règles. Chaque communauté culturelle dispose d’un tel bagage toujours en développement, images auxquelles elle s’identifie, s’estime, se projette dans l’avenir, accompli sa vocation. On comprend comment le débordement universaliste est ou a été dommageable substituant le «pouvoir» des formes et de ceux qui les manient au pouvoir des hommes dans leurs communautés. Il sera utile le moment venu de resituer le développement et la culture des re-présentations mentales comme un stade d’évolution des communautés culturelles. La crise des représentations (mentales) du moment, crise culturelle, marque une difficulté de passage à un nouveau stade de développement culturel communautaire. C’est l’enjeu d’une mutation de civilisation déjà avancée.
L’approche des communautés culturelles couvre un champ extrêmement vaste que la pratique de l’intelligence symbolique permettra de traiter utilement.