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047 – Logiques d’action

Une question des plus opaques tellement les milieux de vie favorisent les processus conventionnels et renvoie dans l’exception tout ce qui est créativité, tout en le mettant dans des cases, celle du spectacle, de la mode ou celle de l’aventurisme. Du coup des tensions apparaissent entre l’émergence d’une logique d’innovation et l’obsolescence d’autres logiques plus familières. La conséquence est l’effet de dysfonctionnement, d’inefficacité, des méthodes et pratiques anciennes qui apparaissent rétrogrades alors qu’elle étaient déclarées modernes jusque là. C’est le signe d’une mutation de civilisation où les processus qui se dessinent impliquent les communautés, la créativité, l’autonomie, la singularité après un temps où a régné le standard, la reproduction des modèles et enfin un chacun pour soi compétitif. Du coup ce qui ne faisait pas question avec les rationalités formelles se révèle incapable de maîtriser les enjeux nouveaux.

Les positions et logiques d’action praxéologiques*, s’appuient sur deux des dialectiques des positions de vie explorées antérieurement. L’une oppose individualisme et responsabilité qui sont ici sous le mode spéculation captatrice contre participation communautaire. Elle traverse par exemple l’univers économique. La spéculation financière ou celle de la revendication de plus de bénéfices pour moins d’investissements sont interpellés par une logique de participation communautaire de co-construction, de concertation, de coopération, de concourance ou l’implication dans les enjeux communs est le gage d’une action fructueuse. Reste que les processus communautaires ont été évacués de la culture de ce pays et donc ignorés passant pour une nouveauté inouïe alors que des traditions en ont aussi témoigné mais ont été chassées par la modernité.

L’autre dialectique oppose la logique créatrice à la logique de reproduction des normes et modèles, la conformation aux procédures, l’application des règles faisant du conformisme le gage d’efficacité reproductrice. L’innovation et la créativité y apparaissaient comme un désordre, une anomalie. L’action comme expression de potentiels, comme processus de création singulier, s’inspire des arts sans rester obligatoirement dans l’exception marginale. L’autonomisation, la liberté responsable en font le support d’une voie nouvelle de l’action à la fois personnelle et communautaire avec l’innovation

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Les quatre positions et logiques d’action.

La tradition

Chacun trouve sa place en reproduisant des comportements, procédures, règles dans un contexte social, communautaire, culturel qui se trouve ainsi engagé dans sa propre reproduction. La tradition est ici l’ensemble des pratiques d’une communauté culturelle, valeurs et façons d’agir qu’il s’agit d’adopter pour en perpétuer les moyens d’existence et les productions. Les modèles industriels et bureaucratiques et les organisations qui privilégient leur continuité, leur pérennité comme seule ambition établissent les moyens de reproduction par la transmission des savoirs et des savoir faire. L’école et l’organisation des activités collectives structurent la vie utile des hommes dans les rôles qui leur sont assignés selon les normes établies.

À l’inverse

Le succès

Il s’agit d’une logique de succès individuel conjuguant le jeu spéculatif de la chance (tirer le bon numéro) conjugué avec quelque richesse personnelle originale qui justifie ce coup du sort. Dans le monde contemporain les figures du vedettariat, la vanité des pouvoirs, fournissent un modèle d’action très particulier. En effet le succès dépend de potentialités singulières qui ne renvoie qu’aux atouts personnels ou sociaux donc inimitables, et d’investissements spéculatifs qui justifient les résultats par la chance, donc non reproductibles. Le paradoxe c’est qu’il n’y a pas de lien entre l’acte et son produit, la mise et le gain obtenu sauf par intervention sur le hasard, sur le sort par l’effet d’un pouvoir magique. Le héros qui détiens ces pouvoirs peut intervenir sur le sort qui lui apporte le succès. Puissance et séduction, spéculation et pouvoirs, telles sont les équations du succès.

La compétition

Dans le cadre des règles et des modèles existants la compétition met en concours les individus pour sélectionner les meilleurs. Obtenir les meilleurs résultats par l’exercice maîtrisé des règles et procédures, dans les cadres établis selon les modèles de pensée et d’organisation établis tel est l’enjeu. Se développe alors une méritocratie qui n’a pas de considération pour ceux qui échouent dans les épreuves de sélection ou ne sont pas au niveau des meilleurs. Tirer son épingle du jeu dans un monde aux structures bien établies ne donne valeur qu’à la réussite individuelle et à la reproduction des modèles normatifs. La compétition cultive un individualisme et un conservatisme, indifférents au bien commun quel que soit le milieu comme par exemple le marché, l’Etat, telle organisation ou institution. Elle est à la base de tous les corporatismes.

À l’inverse

L’innovation

Elle conjugue la créativité et les potentiels personnels avec une inscription dans un processus communautaire. La méthode, participative, n’est pas la conformation à un modèle collectif mais à un processus de conjugaison des originalités. Ainsi l’autonomie et les potentiels personnels sont engagés dans une autonomie et des potentiels culturels qui n’en sont ni l’addition si la soustraction. En effet la pratique personnelle, originale, s’exerce dans un contexte collectif pour constituer une pratique collective et celle-ci n’est rien d’autre que la conjugaison des pratiques personnelles. Ainsi toute action est innovation par l’originalité des investissements personnels et culturels. Elle s’inscrit dans un Sens du bien commun et le conSensus correspondant pour traiter des situations qui sont toujours singulières.

* Praxéologie ou science de l’action humaine. Citation de wikipédia :

«La praxéologie traite de l’action humaine en tant que telle, d’une façon universelle et générale. Elle ne traite ni des conditions particulières de l’environnement dans lequel l’homme agit ni du contenu concret des évaluations qui dirigent ses actions. Pour la praxéologie, les données sont les caractéristiques psychologiques et physiques des hommes agissants, leurs désirs et leurs jugements de valeur, et les théories, doctrines, et idéologies qu’ils développent pour s’adapter de façon intentionnelle aux conditions de leur environnement et atteindre ainsi les fins qu’ils visent. » (Ludwig von Mises, L’Action humaine, 1949)

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